Paysages

Paysages métropolitains

Agora, biennale de Bordeaux Métropole – architecture, urbanisme et design se déroulera du 14 au 24 septembre 2017 au Hangar 14 et partout en ville.
Après les métropoles millionnaires en 2010, le patrimoine en 2012 et les espaces publics en 2014, la Ville de Bordeaux propose pour Agora 2017, le thème « Paysages métropolitains ».

Château de Padiès, Lempaut, France © Bas Smets

A.Z.T. & O.C.M.W., Turnhout, Belgique © Bas Smets

Sunken Garden, Londres, GB © Bas Smets

Pourquoi choisir pour Agora 2017 le thème du paysage ?

Et, s’il est un thème fondateur, pourquoi avoir attendu 7 éditions d’Agora avant de le retenir ?

Parce que, pour évident qu’il paraisse, il est difficile à voir de façon immédiate, sans le détour de la pensée ou du langage.

« L’importance exagérée du langage dans la formation et plus généralement dans notre société, n’est pas sans rapport avec l’hégémonie du visuel. Ils sont l’un et l’autre du côté de l’efficace, de la synthèse, et parce qu’ils ont le pouvoir de négliger, on les utilise souvent pour maîtriser les choses.
À trop voir, on finit par oublier que le paysage n’est pas réductible à la somme de nos représentations. Il y a, sous les figurations présentes, une infinité de dévoilements possibles. » (Michel Corajoud)

Cette polysémie du paysage, ces mystères qui cachent peut-être une vérité première, nous avons cru pendant des siècles que la rationalité et la technique allaient les dévoiler, comme les Grecs le croyaient quand ils construisaient le temple d’Apollon à Delphes, au dessus de la faille au bord de laquelle la Pythie rendait ses oracles…

Aujourd’hui les catastrophes climatiques nous enseignent qu’il est bien présomptueux de vouloir maîtriser la nature comme il est bien présomptueux de vouloir la nier : Bordeaux, construite sur l’eau, en sait quelque chose.

Mais les hommes bâtissent car c’est dans leur essence. Pendant longtemps ils ont bâti avec la nature, en tentant une conciliation avec elle, puis ils ont oublié.

De tout cela, de cette culture issue de nos civilisations est né ce que nous appelons le paysage, qui n’est pas la nature ou alors une nature retravaillée par l’homme et vue au travers du tamis de nos représentations.

L’évolution de nos sociétés nous fait rechercher une façon nouvelle de faire les villes mais aussi les territoires suburbains avec des questions nouvelles et bienvenues : le site fait le projet, le projet fait la règle.

Mais avec parfois des paradoxes heuristiques qui prônent que, à l’inverse, le programme peut aussi faire le site.

Toutes ces questions complexes, d’enjeu planétaire dans un monde majoritairement urbanisé, climatiquement aléatoire et demain, peut-être, culturellement lissé, ne sont pas des questions théoriques. Les réponses qu’on leur apporte conditionnent largement le dessin de notre cadre de vie.

L’ADN de Bordeaux et de son aire urbaine ? L’eau, le fleuve, les jalles, les coteaux… bref un paysage, des paysages. Rien de naturel pourtant : la marque des hommes est omni présente même si elle appartient au passé. Un passé que l’obsession de la page blanche ou l’indifférence avait progressivement gommé.

« Il est acquis que Michel Corajoud a refondé la pensée du paysage en France. Je me rends compte aujourd’hui qu’il véhiculait une pensée post-moderne italienne, proche d’ailleurs de certaines analyses de Rem Koolhaas sur la ville américaine. Les grilles géométriques révélaient les géographies naturelles. Cette distinction entre la chose construite et la géographie naturelle est déterminante dans notre intelligence du paysage.
Le jeu avec les traces, leur repérage précis, l’attention portée à leur transformation caractérisent la démarche d’Alexandre Chemetoff. Après lui, la page blanche disparaît de l’esprit des paysagistes français. » (Michel Desvigne, le paysage en préalable).

Bordeaux, intuitivement, a compris depuis longtemps l’importance du paysage dans son destin urbain, sans commune mesure avec les parcs et jardins, les traditions de mosaïculture, ou les belles plantations d’alignement de nos villes académiques. D’où la place qu’elle réserve aux paysagistes – et aux plus grands – depuis 20 ans : Michel Corajoud bien sûr pour les quais rive gauche, Michel Desvigne pour le parc aux Angéliques rive droite et pour le quartier de Brazza, Catherine Mosbach pour le jardin botanique, Pascal Cribier pour le parc que va réaliser l’EPA rive droite mais aussi les agences TER, Base, Signes et… Bas Smets dans le cadre du projet 55 000 hectares pour la nature porté par la métropole. C’est dire les enjeux métropolitains liés au paysage comme à la nature et dont Agora devra, entre autres, se faire le héraut.

Paysages métropolitains

Édito d’Alain Juppé

Bas Smets, Commissaire d’Agora 2017

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Édito de Bas Smets
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